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  • arth1996

Le jeûne, un mot... de nombreuses pratiques !

Ces dernières années, le jeûne a été remis au-devant de la scène par les médias (notamment grâce à l’émergence du jeûne intermittent) qui lui ont donné des propriétés thérapeutiques extraordinaires permettant de perdre du poids, de soigner le cancer et même lutter contre le vieillissement.



Le jeûne peut se définir comme suit : “Arrêt total de l'alimentation, avec maintien ou non de la consommation d'eau.” et “Pratique religieuse consistant en une privation complète ou partielle de nourriture.” (Le Larousse).

Ce que l’on remarque tout d’abord c’est que le jeûne est encore actuellement très ancré dans nos esprits comme une pratique spirituelle (l’Hindouisme) et/ou religieuse (Ramadan pour les musulmans, Carême pour les chrétiens, ...). Si on prend l’exemple du Ramadan, les pratiquants ne mangent et ne boivent pas durant la journée qui est délimitée par le lever et le coucher du soleil.



Photo de musulmans priant à la Mecque.

Pourtant, comme on peut le voir dans la définition, le jeûne consiste simplement à ne pas s’alimenter (la restriction hydrique étant la plupart du temps présent dans les pratiques religieuses) pendant un laps de temps. Si l’on revient à notre propre physiologie, l’Homme suit une horloge interne que l’on appelle rythme circadien et qui nous fait naturellement jeûner la nuit. Cette horloge présente dans notre cerveau réagit à la luminosité des rayons solaires qui définissent des fonctions importantes de notre organisme. Nous sommes donc tous adaptés à avoir des périodes sans s’alimenter (jeûner entre les repas et nocturne) même à plus long terme. Mais comment notre corps arrive à tenir jusqu’à 1 mois sans s’alimenter ? Par 4 mécanismes :

  • L’utilisation des stocks de sucres dans l’organismes appelés “glycogène”. La plus grande réserve étant dans le foie et une petite quantité dans les muscles ( la partie musculaire est utilisé pour alimenter exclusivement les muscles). Cette réserves est utilisé entre les repas, pendant un exercice physique et couvrent généralement 24h00.

  • L’utilisation des protéines contenu dans nos muscles (une sorte de cannabisme de notre corps appelé “protéolyse”).

  • L’utilisation des stocks de graisses ( dépend de la quantité de graisses dans le corps

  • La production de corps cétoniques (proviennent de l’oxydation des graisses) qui sont utilisés par le cerveau lors de très longue période de jeûne et a inspiré la “diet cétogène” mais ce sujet sera abordé dans un autre article. Point important, les corps cétoniques sont acidifiant ce qui sur une période plus ou moins longue pourrait être un problème grave.

Comme nous l’avons vu, notre organisme peut supporter de longue période sans s’alimenter (mais seulement 3-4 jours sans boire). Pourtant, l’évolution de notre façon de s’alimenter a changé très rapidement par rapport à notre nature. Nous sommes passés à une alimentation intermittente avec de longues périodes de jeûne (matin, midi et soir) … à une alimentation quasi permanente avec de courtes périodes de jeûne (grignotages)… Cela peut expliquer en partie pourquoi l’obésité est un fléau mondial aujourd’hui.



Pour approfondir : nombreuses conséquences de notre rythme biologique sur les fonctions de notre organisme. Bass J et al., 2010

Pour ce qui veulent approfondir le sujet, il y a également une horloge interne propre à chaque organe et qui est influencé par la lumière solaire mais aussi notre alimentation. En tout cas ce qui est sûr c’est qu’une désynchronisation de ses rythmes biologiques entraînent des conséquences néfastes : état de fatigue, trouble du sommeil, grignotage de nuit, prise de poids,


Les différentes horloges biologiques et le concept de synchronisation. Bass J et al., 2010


Vous l’avez surement compris, il existe beaucoup de façon de jeûner. Voici quelques exemples :

  • Le jeûne alterné (1:1): on s’alimente un jour (les quantités peuvent variées) puis le jour suivant on jeûne.

  • Le jeûne intermittent (5:2 diète): on s’alimente 5 jours puis on jeûne 2 jours.

  • Le jeûne quotidien limité (> 12h) : on s’alimente normalement mais on mange sur un temps plus restreint donc on augmente son jeûne nocturne.



Les différents types de jeûne. Cours Pr Thissen (UCLouvain, Bruxelles), image provenant de Matteson MP et al., 2014.

Maintenant que vous comprenez que le mot jeûne est un terme très vague, on peut essayer de s’attarder sur d’éventuels bienfaits.

Le vieillissement

Il semble que ce soit une légère restriction calorique qui est associé à une plus faible mortalité. Cela est mis en avant par un papier sur des primates qui ont consommé 30% de moins que le groupe contrôle (Colman RJ et al., 2009) ainsi qu’une étude sur la population de Okinawa qui est connu pour avoir 5x plus de centenaires et un apport calorique réduit de 17%. Cela est également expliqué par le fait que cette population mange moins de viandes, plus de poissons et beaucoup de fruits et légumes (Most J et al., 2016). Enfin, l’étude CALERIE qui a montrait une diminution des risques cardiovasculaires et donc de la longévité (Ravussin E et al., 2015) !

Il faut bien comprendre que le jeûne n’est pas associé systématiquement à un déficit calorique. En effet, tout dépend de la balance énergétique entre les apports et les dépenses. Autrement dit, si vos apports caloriques sont de 2000 kilocalories/J et que vous jeûnez un jour puis le lendemain vous consommez 4000 kilocalories alors la résultante est nul et vous ne perdrez pas de poids. Cela est toujours le cas pour n’importe quel type de situation, jeûne ou non.


Okinawa, une petite île pleine de centenaires.

Le cancer

Le jeûne n’est malheureusement pas un remède miracle pour guérir du cancer mais il semblerait selon des données animales et une étude pilote (sur des humains) que celui-ci potentialise les effets de la chimiothérapie et en réduit les effets secondaires. (Safdie FM et al., 2009;Lee C et al., 2012;Di Biase S et al., 2016). Une review (article faisant état des lieux des publications scientifiques dans une thématique précise) publié dans la prestigieuse revue “Nature review cancer” a confirmé les effets précédemment cités (Nencioni A and al, 2018). A l’inverse, ne pas manger assez peut vite amener à une dénutrition, lors d’un Cancer. Donc il est important de suivre l’avis d’un professionnel de santé (Médecin et diététicien).

La perte de poids

Si l’on part du même principe et que vos besoins caloriques sont de 2000 kilocalories/J , si vous jeûnez un jour puis le lendemain vous consommez 4200 kilocalories alors vous prendrez du poids à moyen terme. Bien sûr, nous prenons l’exemple d’un scénario avec un gain de poids pour vous faire comprendre notre message mais il est évident qu’il est plus probable que vous maintenez votre poids ou vous en perdrez.

De ce fait, que ce soit le jeûne alterné, le jeûne intermittent ou encore le jeûne limité, aucun n’a montré une efficacité supérieure à une restriction calorique classique pour la perte de poids (Rynders CA and al 2019).

Notre avis : le jeûne limité légèrement adapté est selon nous la meilleure alternative pour rester en bonne santé !

Pour rappel, le jeûne limité consiste simplement à manger dans une plage horaire réduite (par exemple entre 8h00 jusque 14h00). Cela a de nombreux avantages pour la santé comme la réduction de la tension artérielle, une diminution de la sensation d’appétit le soir, une meilleure sensibilité à l’insuline et une perte de poids possible (s'il y a une restriction calorique). Le plus gros inconvénient de ce type de jeûne est qu’il ne convient pas forcément à notre vie active moderne où il parait peu concevable de manger seulement entre 8h00 et 14h00.


Effet du jeûne limité. Sutton EF et al., 2018

De ce fait, nous vous conseillons un compromis qui consiste à simplement allonger la durée de votre jeûne nocturne en ne vous alimentant plus après 20h00. Cela permet d’améliorer à la fois son impact sur sa santé mais également de réduire les inconvénients du jeûne alterné ou intermittent qui sont difficiles à suivre et de rendre le jeûne limité plus réalisable.

Les risques du jeûne

  • Malnutrition avec perte de masse musculaire car le corps utilise facilement les muscles pour produire de l'énergie.

  • Risque de déshydratation avec hypotension (Surtout pour les jeûnes avec restriction hydriques comme le Ramadan)

  • Risque de mauvaise haleine (à cause des corps cétoniques)

  • Plus de risque d’avoir des pierres aux reins

  • Manque d’énergie pour les sportifs

Le Jeûne oui mais pas pour tout le monde !

  • Enfants

  • Sujets âgés

  • Sujet présentant un sous-poids

  • Sportifs

  • Jeûne complet de plus de 3 jours

Le mot de la fin :

Comme nous l’avons vu, lorsque l’on parle de jeûne, il faut savoir à quel type de jeûne on a affaire. Malgré ce que les médias véhicule et ce que le grand publique pense, le jeûne ne semble pas aussi prometteur que prévu surtout pour la perte de poids. En effet, aucun type de jeûne n’a montré une efficacité supérieure à une simple restriction calorique. Sachant que l’acte de s’alimenter est également un acte social et de plaisir, il nous semble plus judicieux de manger un petit peu moins lors des repas et d’augmenter notre temps de jeûne nocturne pour maintenir/stabiliser notre poids. Le jeûne intermittent qui est très populaire en ce moment est donc un effet de mode. En revanche, il apparaît essentiel de respecter son rythme circadien pour rester en bonne santé sur le long terme et protéger de pathologies comme le diabète, la prise de poids et les pathologies cardiovasculaires.

Sources :

1. Ravussin E, Redman LM, Rochon J, et al. A 2-Year Randomized Controlled Trial of Human Caloric Restriction: Feasibility and Effects on Predictors of Health Span and Longevity. J Gerontol A Biol Sci Med Sci. 2015;70(9):1097-1104. doi:10.1093/gerona/glv057

2. Colman RJ, Anderson RM, Johnson SC, et al. Caloric restriction delays disease onset and mortality in rhesus monkeys. Science. 2009;325(5937):201-204. doi:10.1126/science.1173635

3. Most J, Tosti V, Redman LM, Fontana L. Calorie restriction in humans: An update. Ageing Res Rev. 2017;39:36-45. doi:10.1016/j.arr.2016.08.005

4. Sutton EF, Beyl R, Early KS, Cefalu WT, Ravussin E, Peterson CM. Early Time-Restricted Feeding Improves Insulin Sensitivity, Blood Pressure, and Oxidative Stress Even without Weight Loss in Men with Prediabetes. Cell Metab. 2018;27(6):1212-1221.e3. doi:10.1016/j.cmet.2018.04.010

5. Rynders CA, Thomas EA, Zaman A, Pan Z, Catenacci VA, Melanson EL. Effectiveness of Intermittent Fasting and Time-Restricted Feeding Compared to Continuous Energy Restriction for Weight Loss. Nutrients. 2019;11(10). doi:10.3390/nu11102442

6. Safdie FM, Dorff T, Quinn D, et al. Fasting and cancer treatment in humans: A case series report. Aging. 2009;1(12):988-1007. doi:10.18632/aging.100114

7. Nencioni A, Caffa I, Cortellino S, Longo VD. Fasting and cancer: molecular mechanisms and clinical application. Nat Rev Cancer. 2018;18(11):707-719. doi:10.1038/s41568-018-0061-0

8. Lee C, Raffaghello L, Brandhorst S, et al. Fasting cycles retard growth of tumors and sensitize a range of cancer cell types to chemotherapy. Sci Transl Med. 2012;4(124):124ra27. doi:10.1126/scitranslmed.3003293

9. Di Biase S, Lee C, Brandhorst S, et al. Fasting-Mimicking Diet Reduces HO-1 to Promote T Cell-Mediated Tumor Cytotoxicity. Cancer Cell. 2016;30(1):136-146. doi:10.1016/j.ccell.2016.06.005

10. Mattson MP, Allison DB, Fontana L, et al. Meal frequency and timing in health and disease. Proc Natl Acad Sci U S A. 2014;111(47):16647-16653. doi:10.1073/pnas.1413965111

11. Bass J, Takahashi JS. Circadian Integration of Metabolism and Energetics. Science. 2010;330(6009):1349-1354. doi:10.1126/science.1195027




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